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L’objectif principal de cette étude était d’explorer l’hypothèse de traitements différentiels dans la prise en charge de la douleur des patientes racisées en salle de naissance par des sages-femmes. Cette étude qualitative est basée sur neufs entretiens semi-directifs dont cinq en Nouvelle-Aquitaine et quatre en Guyane. Premièrement, nous avons pu mettre en avant un phénomène de catégorisation des patientes par les soignantes interrogées. En Nouvelle-Aquitaine, les principales catégories qui apparaissent sont les patientes identifiées comme « Africaines », patientes définies comme originaire de l’Afrique subsaharienne, et « Maghrébines », patientes définies comme originaire de l’Afrique du Nord. En Guyane, beaucoup plus de catégories ont été citées, mais nous nous sommes concentrés sur les deux populations majoritairement citées : les patientes Bushinenguées, population descendante d’Africaine.s mis.es en esclavage en Guyane et au Suriname, et les patientes Haïtiennes. Deuxièmement, nous avons pu mettre en évidence les différences observées de ces patientes dans leur expression de la douleur. Il ressort de cette étude que les patientes Africaines et Bushinenguées expriment peu leur douleur et sont plus autonomes, et les patientes Maghrébines et Haïtiennes, à l’inverse, sont très expansives dans leur expression de la douleur. Cela peut alors mettre les soignantes en difficulté dans la prise en charge de ces patientes. Ainsi en troisième partie, nous avons mis en évidence les causes de ces difficultés. Elles sont notamment expliquées par les sages-femmes interrogées par : la barrière de la langue, la représentation de l’accouchement et de la péridurale, la confiance en la médecine occidentale ou encore la manière dont sont accompagnées par leur proche ces patientes en salle de naissance. Enfin, en quatrième partie, les principales conséquences de ces difficultés sont mises en évidence : prise en charge retardée, moins d’attention voire de la négligence donnée dans le soin. Malgré un désir d’adaptation des soignantes face à ces difficultés, il existe des traitements différentiels dans la prise en charge de la douleur des patientes racisées. Des protocoles de dépistage puis des prises en charge de la douleur seraient intéressant à tester pour minimiser ces traitements différentiels. Enfin, mieux comprendre les personnes que nous soignons et les représentations que nous nous en faisons, nous permettrait de mieux les prendre en charge dans leur douleur.