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Introduction : Les maladies cardiovasculaires (MCV) sont graves et fréquentes. La précarité en est un facteur de risque. La Couverture Maladie universelle (CMU), puis la Complémentaire Santé Solidaire (CSS), ont été mises en place afin de lutter contre les inégalités sociales de santé (ISS). Cependant malgré leur mise en place, des inégalités persistantes sont constatées, notamment thérapeutiques. Les bétabloquants ont une place importante dans le traitement des MCV. L'objectif principal de notre étude était de comparer les remboursements du Bisoprolol et du Nébivolol, pour les patients bénéficiaires de la CSS et ceux ayant le Régime Général de l'Assurance Maladie, toutes spécialités confondues, de 2019 à 2021, en France métropolitaine et dans les Départements et Régions d'Outre-Mer. L'objectif secondaire était d'analyser l'association entre la Dose Délivrée Moyenne (DDM) et le taux de précarité régional.
Méthode : Nous avons réalisé une étude quantitative, observationnelle, descriptive, transversale, rétrospective, pharmaco-épidémiologique. Les DDM de Bisoprolol et de Nébivolol ont été calculées avec les données de remboursements de l'Assurance maladie de l'ISPL, par région, par année, dans les groupes « Précaire P » et « Non Précaire NP ». Les DDM moyennes ont été comparées entre les deux groupes avec un Test de Student. Puis les DDM ont été ajustées avec le taux de précarité régional selon une analyse bivariée.
Résultats : L'étude principale montrait une différence significative entre les DDM des groupes P et NP, en défaveur des bénéficiaires de la CSS, pour le Bisoprolol et pour le Nébivolol, de 2019 à 2021 (p-value < 0,05). L'étude secondaire retrouvait une association significativement positive entre la DDM de Bisoprolol et l'augmentation du taux de précarité régionale, dans les deux groupes. L'association était significativement négative pour le Nébivolol dans les deux groupes (sauf en 2020 et 2021 pour le groupe NP, p-value > 0,05).
Discussion : Nos résultats suggèrent une persistance des ISS malgré l'existence de la CSS. Elles se manifestent ici par une probable sous-prescription et une sous-consommation du Bisoprolol et du Nébivolol parmi ses bénéficiaires. Ces différences peuvent être expliquées par plusieurs facteurs, notamment les caractéristiques socio-culturelles de cette population et le moindre accès aux soins spécialisés, mais aussi par les difficultés rencontrées par les médecins et leur attitude à l'encontre de ces patients. La prévalence des bénéficiaires de la CSS semble aussi influencer les prescriptions, de manière positive pour le Bisoprolol et négative pour le Nébivolol. Il serait intéressant de poursuivre cette étude en disposant des caractéristiques précises des patients et des médecins, afin d'ajuster sur plusieurs variables confusionnelles. Devant les différences observées entre le Bisoprolol, à prescription initiale restreinte, et le Nébivolol, une étude comparant les remboursements de ces deux traitements selon la spécialité du prescripteur serait pertinente. Ces études sont menées afin de mieux comprendre et de lutter contre les ISS.