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INTRODUCTION :
Le manque de suivi médical et l'absence de médecin traitant chez les internes observés dans de nombreuses études nous conduisent à penser que les pratiques d'auto-prescription doivent être fréquentes chez les internes en médecine. Selon plusieurs études, les internes de médecine générale sont amateurs de ces pratiques et leur propre suivi médical est souvent négligé en raison du manque de temps ou de confiance excessive.
L'objectif principal de ce travail de thèse était de faire un état des lieux de la santé et des pratiques d'auto-prescription chez les internes de la faculté de Poitiers. Nous avons analysé ces pratiques et leur suivi médical, en confrontant nos résultats aux données des autres études et en particulier celle d'O. Ridet soutenue en 2013 à Poitiers.
MATERIELS ET METHODES : Nous avons utilisé une étude quantitative descriptive transversale monocentrique. Un questionnaire anonyme en ligne a été créé et envoyé par courriel et via les réseaux sociaux à tous les internes de médecine générale de Poitiers des promotions 2019 à 2022. Des comparaisons de groupe ont été recherchées par des analyses univariées (test exact de Fischer ou du Chi2). Le seuil de significativité retenu était de 0,05.
RESULTATS :
Seulement 81,1% des internes ont un médecin traitant déclaré dont 47% dans une autre région. Ce pourcentage, bien qu'il reste équivalent à 2013, est inférieur à celui dans la population générale. Depuis le début de l'internat, 76,9% des internes ont consulté un médecin. Ils ont tendance à consulter directement un spécialiste plutôt que leur médecin traitant. Cependant, 40,3 % des internes trouvent difficile de consulter et ceux ayant un traitement régulier consultent rarement pour renouveler leur traitement. L'auto-prescription est la règle.
La quasi-totalité des internes (97,2 %) pratiquent l'auto-prescription médicamenteuse et, dans une moindre mesure, pour des examens complémentaires ou des certificats. La consommation d'anxiolytiques, d'antidépresseurs et d'hypnotiques chez les internes de Poitiers est supérieure à celle de 2013 et est plus importante que dans la population générale. En majorité, les internes estiment leurs auto-prescriptions conformes aux recommandations de bonne pratique et ils refusent de s'auto-prescrire certaines classes de traitement ou produits médicamenteux. Ces pratiques sont principalement justifiées par des raisons de gain de temps, d'organisation et de compétence professionnelle suffisante.
DISCUSSION et CONCLUSION :
Cette étude révèle un manque de suivi médical et une pratique très répandue de l'auto-prescription chez les internes. Le taux d'internes sans médecin traitant est stable comparé à 2013 et inférieur à 20%. En revanche, on note une diminution du nombre d'internes s'estimant en bonne santé et une augmentation de la consommation d'anxiolytiques, d'antidépresseurs et d'hypnotiques. Le recours à l'auto-prescription est multifactoriel et il ne semble pas y avoir de solutions simples pour réduire les risques associés à cette pratique. De plus, aucune sensibilisation des internes sur leur santé n'a été mise en place depuis 2013. Dès lors, l'instauration d'une formation dédiée et d'un suivi médical adapté chez les internes apparaît comme une priorité.