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Introduction : Face au vieillissement de la population et à la prévalence des cancers chez les personnes âgées, il est indispensable d’améliorer le parcours de soins. La création de lits dédiés d’oncogériatrie sur des lits de court séjour gériatrique doit permettre de prendre en charge cette population spécifique pour des hospitalisations non programmées, qui constituent bien souvent une rupture dans le parcours de soins. Cette nouvelle filière doit s’organiser et s’intégrer au sein d’un parcours qui comprend déjà l’évaluation pré-thérapeutique et le suivi. La pérennité de ces unités impose une connaissance précise des caractéristiques et des besoins de cette population afin de mettre en place des soins adaptés.
Objectifs : L’objectif principal de ce travail était de réaliser un état des lieux médical et paramédical des patients âgés atteints de cancer, admis en hospitalisation non programmée sur des lits dédiés d’oncogériatrie.
Méthode : Etude rétrospective, monocentrique, observationnelle et descriptive réalisée au CHU de Poitiers, en unité de court séjour gériatrique sur des lits dédiés d’oncogériatrie du 1er avril 2019 au 31 mars 2020. Tous les patients hospitalisés pendant cette période sur les lits d’oncogériatrie étaient éligibles. Les données socio-démographiques, gériatriques, oncologiques et celles en lien avec l’hospitalisation étaient recueillies dans les dossiers médicaux et soignants informatisés du CHU.
Résultats : 219 hospitalisations ont été analysées. La moyenne d’âge était de 86,2 ans. Le GIR moyen était de 3,4 avec un CIRS-G > 6 pour ¾ des patients. 69% des patients prenaient plus de 5 médicaments. Une anémie était retrouvée dans 86% des cas et ¾ des patients présentaient une dénutrition. La majorité des patients étaient connus de l’oncologie avec les 2/3 en prise en charge palliative. Un tiers d’entre eux était suivi en oncogériatrie. Plus de la moitié des hospitalisations se faisaient via le service des urgences. Le motif d’admission le plus fréquent était une altération de l’état général. Au cours de l’hospitalisation, 2/3 des patients hospitalisés avaient eu recours au kinésithérapeute, la moitié à la diététicienne et près d’1/3 à une évaluation psychologique. Seulement 16% des patients avaient eu une évaluation sociale. Un traitement antalgique de palier 3 était nécessaire dans plus de la moitié des hospitalisations. Aux dernières nouvelles, plus de 70% des patients étaient décédés. L’analyse univariée montre que les patients connus de l’oncologie bénéficiaient plus souvent d’un aidant naturel (p<0,001). Ils étaient plus souvent métastatiques (p=0,0005). Les patients métastatiques bénéficiaient plus souvent de PCA ou PSE (p<0,0001) ainsi que d’antalgiques de palier 3 (p=0,0001). Les patients ayant bénéficié d’un SSR à la suite de leur hospitalisation étaient plus dépendants (p=0,019), plus dénutris (p=0,025) et nécessitaient davantage de traitements antalgiques (p=0,038). Leur prise en charge était significativement plus palliative (p=0,05). Ces patients avaient eu recours plus souvent, dès le court séjour, au kinésithérapeute (p<0,0001), à l’ergothérapeute (p=0,028), à la diététicienne (p=0,0002), à la psychologue (p=0,025) ainsi qu’à l’assistante sociale (p=0,004).
Conclusion : La population hospitalisée sur des lits dédiés d’oncogériatrie dans le cadre d’une pathologie aiguë est âgée, comorbide, dépendante, et présente une fragilité gériatrique importante. Ces patients, pour la plupart connus de l’oncologie, sont en grande majorité métastatiques, douloureux et requièrent une prise en charge pluridisciplinaire dès le court séjour. Ceci implique, pour un bon fonctionnement, des soignants médicaux et paramédicaux formés et en nombre. Afin de faire face au tsunami gériatrique des prochaines années, nos tutelles doivent donner les moyens à l’oncogériatrie d’optimiser les parcours de soins, d’autant plus que le prochain défi réside dans la prise en charge péri-opératoire, où ses unités auront très probablement un rôle à jouer.