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Le trouble obsessionnel compulsif (TOC) est caractérisé par l'association d'obsessions et de compulsions. Les obsessions sont des pensées, idées, ou images intrusives générant chez le patient de l'anxiété. Les compulsions correspondent à des comportements répétitifs ayant pour objet de neutraliser l'anxiété générée par les obsessions. Bien que le patient ait conscience du caractère absurde de ses symptômes, il doit les réaliser. La maladie entraîne une altération marquée de la qualité de vie des patients et un coût socio-économique important. Le traitement repose sur une prise en charge en thérapie cognitivo-comportementale associée à des traitements antidépresseurs. Une certaine proportion de patients (40-60%) reste symptomatique malgré un traitement bien conduit, et certains présentent une forme si sévère qu'elle conduit à un handicap majeur et représente un enjeu de santé publique. D'autres thérapeutiques sont à l'étude afin d'aider ses patients qui résistent aux traitements « classiques ». La stimulation magnétique transcrânienne répétitive (rTMS) en fait partie, avec des résultats encourageants dans plusieurs études, qui ciblaient notamment deux zones corticales : le cortex orbito-frontal et les cortex préfrontaux dorso-latéraux. Le ciblage de ces zones a été déterminé à partir de la physiopathologie de la maladie, dans le but de moduler sélectivement le dysfonctionnement des réseaux de neurones cortico- striato-pallido-thalamo-corticaux, limbiques et associatifs, impliqués dans la génèse de la maladie. Cette technique thérapeutique est intéressante mais sa mise en place est lourde et chronophage d'où la nécessité de mettre en place d'autres techniques thérapeutiques qui seraient aussi efficaces et plus faciles à mettre en place.
Une autre technique de stimulation cérébrale non invasive, la stimulation transcrânienne directe par courant continu (tDCS), pourrait être une option thérapeutique intéressante pour la prise en charge des patients souffrant de TOC pharmacorésistant. La tDCS est basée sur deux stimulations cérébrales superficielles, simultanées, par l'intermédiaire de deux électrodes. La stimulation anodique augmenterait l'excitabilité des neurones corticaux, en regard de l'anode, en dépolarisant la membrane. La stimulation cathodique tend plutôt à hyperpolariser la membrane des neurones corticaux avec pour effet de diminuer leur excitabilité. Les effets post-stimulation résultent notamment d'une modulation des récepteurs NMDA avec pour conséquence un renforcement (suite à une stimulation anodique), ou une inhibition (suite à une stimulation cathodique) au niveau synaptique. Cette technique thérapeutique a déjà montré son efficacité dans d'autres pathologies psychiatriques (notamment chez les patients dépressifs et sur les hallucinations auditives dans la schizophrénie), mais sa place reste indéterminée dans l'arsenal thérapeutique dans le TOC. D'où l'idée de ce projet de recherche visant à évaluer l'efficacité de la tDCS dans le TOC pharmacorésistant.
Ce projet est une étude pilote, en ouvert, qui a été réalisé chez 12 patients souffrant de TOC pharmacorésistant. Les patients ont reçu un traitement actif par tDCS avec stimulation anodique du cortex préfrontal dorso-latéral droit (CPFDLd) et stimulation cathodique du cortex orbito-frontal gauche (COFg). Ils ont bénéficié de 20 séances réparties sur 2 semaines (2 séances par jour). Tous les patients ont été suivis pendant 2 mois. Dans cette étude, le critère de jugement principal était la réduction de la YBOCS d'au moins 35% entre le début (J0) et la fin du traitement (J14).
Dans cette étude pilote, la tDCS utilisée avec les paramètres retenus, n'a pas fait la preuve de son efficacité pour la prise en charge des patients souffrant d'un TOC pharmacorésistant. Effectivement, le score moyen de la Y-BOCS à l'inclusion était de 30,58 (SD=3,5), et de 29,67 (SD=5,2) à J14. Au regard de cette étude, il n'apparaît donc pas justifié de réaliser une étude contrôlée en utilisant la tDCS avec les mêmes paramètres pour traiter des patients souffrant de TOC pharmacorésistant.
Par contre, il ressort de notre étude que la stimulation anodique du CPFDLd pourrait avoir un effet bénéfique sur la thymie des patients traités. Ces résultats devront être confirmés par d'autres études.
Il pourrait être pertinent, dans les études futures qui évalueront la tDCS comme traitement des patients souffrant de TOC sévère pharmacorésistant de modifier certains paramètres. Ainsi, il serait intéressant d'utiliser des intensités de stimulation plus élevées, ou de changer les cibles de stimulation. Si l'hyperactivation du COF apparaît assez nettement en lien avec la symptomatologie présentée par les patients souffrant de TOC, peut-être serait-il intéressant de cibler l'aire motrice supplémentaire à la place du CPFDL.