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Introduction : Une fièvre chez un patient neutropénique impose une antibiothérapie sans délai. L'absence de spécificité de la fièvre pour diagnostiquer une infection est à l'origine d'antibiothérapies excessives et parfois inadaptées, occasionnant une pression de sélection importante. Actuellement, il n'y a pas de marqueur fiable permettant de prédire la survenue d'une bactériémie et la négativation des hémocultures. L'objectif principal de cette étude était de mettre en évidence une corrélation entre la cinétique de la procalcitonine (PCT) et la survenue d'une bactériémie ainsi que sa résolution chez les patients neutropéniques fébriles. L'objectif secondaire était de comparer la PCT à la CRéactive Protéine (CRP).
Patients et Méthodes : Cette étude observationnelle prospective incluait tous les patients de 18 ans et plus, hospitalisés dans le secteur stérile d'onco-hématologie du CHU de Poitiers de Novembre 2014 à Mai 2015, en cours de traitement par chimiothérapie, autogreffe de cellules souches hématopoïétiques ou allogreffe de moelle dans le cadre d’une hémopathie et ayant présenté un ou plusieurs épisodes de neutropénie fébrile. La PCT était dosée à l’entrée dans le service, puis toutes
les 48 heures jusqu’à la sortie d’aplasie, et, en cas de fièvre, au premier et deuxième jour de fièvre. Le reste de la prise en charge était conforme aux protocoles du service. Le critère de jugement principal était l’élévation de la PCT au dessus du seuil de 0,5 ng/ml et l’étude de sa cinétique, en fonction du diagnostic de bactériémie vraie, d’infection cliniquement documenté ou de fièvre d’origine indéterminée (FOI).
Résultats : Entre novembre 2014 et mai 2015, 64 patients ont été inclus, ce qui correspondait à 79 épisodes de neutropénie fébrile. Il y avait 30 leucémies aiguës (46,9%), 14 lymphomes (21,9%), 14 myélomes (21,9%) et 6 syndromes myélodysplasiques (9,4%). Dans 20 épisodes de neutropénie fébrile, il y a eu une ou plusieurs bactériémies vraies (25,3%). Dans 31 épisodes (39,2%), il y a eu une infection documentée uniquement sur le plan clinique ou radiologique. Vingt-huit épisodes (35,4%) ont été classés dans le groupe des FOI. Lorsque l’on considérait le groupe des infections certaines (bactériémies vraies et infections cliniquement prouvées), la PCT avait significativement plus de chances de s’élever (p = 0,0361) par rapport au groupe des FOI, ce qui n’était pas le cas pour la CRP (p = 0.116). Les valeurs médianes de PCT avaient tendance à être plus élevées du 13ème au 24ème jour de neutropénies chez les patients ayant présenté une bactériémie vraie pendant la période de neutropénie, en comparaison aux patients avec une infection documentée seulement cliniquement et aux patients avec FOI.
Conclusion : La PCT semble être un marqueur plus pertinent que la CRP dans le contexte des neutropénies fébriles. Néanmoins, elle ne permet sans doute pas d'éviter la prescription d’antibiotique chez un patient neutropénique fébrile, mais pourrait peut être aider l’arrêt précoce d’une antibiothérapie en cours.