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Introduction : Un tiers des cancers concerne des patients ≥75 ans. La polypathologie de ces
patients âgés et les conséquences des prises en charge thérapeutiques (chirurgie, radiothérapie,
chimiothérapie) plus fréquentes, sont sources d'événements médicaux aigus en cours ou en
suivi de traitement. Cela impose de s'interroger sur le lieu d'hospitalisation le plus adapté
pour ces patients lorsqu'une pathologie aiguë survient.
Objectifs : L'objectif principal de ce travail était de comparer les profils des patients avec
diagnostic de cancer qui étaient hospitalisés pour un problème aigu soit en unité de Médecine
gériatrique soit en Oncologie.
Méthode : Etude épidémiologique analytique, monocentrique, transversale réalisée dans les
unités de court séjour gériatrique et oncologique du CHU de Poitiers du 01/07/2014 au
30/06/2015. Tous les patients ≥75 ans avec un codage de cancer sur les données du PMSI
étaient éligibles. Afin d'avoir une population homogène, seuls les patients avec cancer connu
avant l'hospitalisation et admis pour une problématique aiguë, étaient inclus dans l'étude. Les
paramètres de l'Evaluation Gériatrique Approfondie (EGA), les données oncologiques et
celles en lien avec l'hospitalisation étaient recueillis dans les dossiers médicaux et soignants,
ainsi que dans le dossier informatisé du CHU.
Résultats : 230 patients (156 en Gériatrie, 74 en Oncologie) ont été inclus. Une altération de
l'état général était le motif d'admission le plus fréquent et les patients étaient le plus souvent
déjà connus du secteur d'hospitalisation. Un courrier médical était plus souvent retrouvé pour
les patients hospitalisés en Gériatrie. L'analyse univariée montre que la population admise en
Gériatrie était plus âgée (p<0,05), plus souvent dépendante (p<0,01), cumulaient plus souvent
au moins 2 comorbidités (p<0,01) et étaient plus souvent atteinte de troubles cognitifs
(p<0,01). Les localisations tumorales étaient significativement différentes (p=0,03), plus
souvent métastatiques (p<0,01) et avec une prise en charge plus souvent palliative (p<0,01) en
Oncologie. La mise en place d'aides au retour au domicile (p<0,01) étaient plus marquées
pour les patients en Gériatrie. Une consultation de suivi oncologique était plus souvent
programmée pour les patients d'Oncologie (p<0,01). En analyse multivariée et après
ajustement sur l'âge, un niveau de comorbidités ≥2 (OR 0,18, IC 95% 0,07-0,46 ; p< 0,01), un
degré de dépendance plus élevé (OR 0,07, IC 95% 0,01-0,36 ; p< 0,01) étaient des facteurs
influençant l'admission du patient en secteur gériatrique. La présence d'un traitement antitumoral
en cours (OR 2,60, IC 95% 1,14-5,89 ; p= 0,02) et d'un cancer métastatique (OR
2,63, IC 95% 1,18-5,86 ; p=0,02) influençaient l'hospitalisation dans le secteur oncologique.
Lors du séjour hospitalier, l'intervention des paramédicaux était significativement différente
entre les 2 secteurs, avec en particulier un soutien psychologique plus souvent retrouvé en
Oncologie (OR 45,59, IC 95% 9,79-212,23 ; p<0,01) et un soutien social en Gériatrie (OR
0,13, IC 95% 0.04-0.40 ; p< 0.01).
Conclusion : Cette étude comparative montre des différences significatives dans les profils
sociaux-démographiques et médicaux, des patients âgés atteints d'un cancer, selon qu'ils sont
hospitalisés en Gériatrie ou en Oncologie. Elle montre un adressage plutôt pertinent avec des
patients plus âgés, polypathologiques et dépendants en Gériatrie, et des patients le plus
souvent métastatiques et en cours de traitement anti-tumoral en Oncologie. Ces constats
doivent permettre d'améliorer la filière de soins oncogériatriques, par une meilleure
interaction ville-hôpital, la mise en place de passerelles entre les 2 secteurs d'hospitalisation,
et le début d'une réflexion sur la création de lits de court séjour et de soins de suites
oncogériatriques garantissant une prise en charge globale et complémentaire de cette
population âgée spécifique.