Thèse d'exercice
Mésusage d'alcool, données sociodémographiques et alexithymie : enquête transversale auprès des étudiants de la ville de Poitiers
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Les enquêtes épidémiologiques nationales récentes pointent une évolution des modes de
consommation d'alcool en France : en dépit d'une baisse de la consommation moyenne d'alcool par
habitant et par an depuis plusieurs années, de nouveaux modes d'alcoolisations, ponctuels mais
massifs, sont mis en évidence, notamment chez les 18-25 ans. Ce type d'usage est appelé
alcoolisation ponctuelle importante, ou encore binge drinking, mais aucun des termes qualifiant de
tels usages d'alcool n'a fait encore l'unanimité d'un point de vue scientifique.
Ces nouveaux modes d'alcoolisation s'inscrivent souvent dans des mésusages « aigus »
d'alcool : l'usage à risque ou l'abus. Ces comportements aigus d'alcoolisations n'ont été que peu
considérés par rapport à l'alcoolodépendance dans le champ du soin, pourtant ils peuvent entraîner
des dommages variés et parfois graves (accidents de la voie publique, violences…).
Nous avons voulu nous intéresser, au sein de ces mésusages d'alcool, à une dimension
psychopathologique fréquemment observée chez les sujets dépendants : l'alexithymie. Ce concept,
introduit en 1972 par Sifneos, se caractérisait par l'incapacité à identifier et communiquer ses
sentiments et à les différencier des sensations corporelles, une limitation de la vie imaginaire, une
pensée à contenu pragmatique, avec un mode d'expression très descriptif, et un recours à l'agir pour
éviter les conflits ou exprimer ses émotions. Cette dimension a beaucoup moins été étudiée dans la
littérature au niveau des mésusages d'alcool aigus, contrairement aux cas de dépendance.
Notre enquête transversale avait pour objectifs principaux d'apprécier l'étendue et les
caractéristiques des mésusages d'alcool en population étudiante, et d'évaluer si un lien entre
alexithymie et troubles addictifs de type abus et usage risque d'alcool existait. Nous avons analysé
les résultats de 1936 questionnaires, remplis par des étudiants de Poitiers, âgés de 18 à 25 ans.
Les résultats montrent une part importante des mésusages d'alcool, s'élevant à 54.3%, ce qui
est proche des données nationales correspondantes. On a pu mettre en évidence que l'alexithymie
évoluait dans un lien significatif aux conduites addictives, se renforçant avec l'intensité et la sévérité
de ces dernières. Ce lien apparaissait donc dès l'existence de troubles addictifs de type abus ou usage
à risque d'alcool. Ces résultats paraissaient encore plus saillants chez les étudiants ayant déjà
pratiqué le binge drinking.
Il existe une corrélation significativement forte retrouvée entre les mésusages d'alcool et un
facteur émotionnel d'alexithymie, « difficultés à identifier ses émotions ». Ce facteur dit
thymodépendant, a un lien majeur à la dépression. Il nous semble important d'évaluer la place de la
dépression dans le lien entre alexithymie et mésusages d'alcool auprès de notre échantillon par une
prochaine étude à ce niveau dans notre échantillon.
Devant l'importance des mésusages d'alcool chez les étudiants de 18-25 ans, et la place de
l'alexithymie, souvent décrite comme un facteur péjoratif dans la prise en charge des troubles
addictifs, les professionnels de santé se doivent de proposer des stratégies de prévention et de soin
spécifiques. Il faut sensibiliser au mieux ce public, globalement peu demandeur de prise en charge
pour des conduites addictives, en dépit des nombreux risques auxquels un mésusage d'alcool, même
ponctuel, peut exposer.
Mots-clés libres : mésusage d'alcool, alexithymie, binge drinking, étudiants.
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